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LE PREMIER LIVRE DE SAMUEL (8-12)

 

AVENEMENT ET REGNE DE SAÜL (ch. 8-12)


CHAPITRE 8
            Israël demande un roi
CHAPITRE 9
            Saül, le roi choisi par le peuple
CHAPITRE 10
            Saül présenté au peuple
CHAPITRE 11
            Première victoire de Saül (v. 1-11)
            La royauté confirmée (v. 12-15)
CHAPITRE 12
            Les adieux de Samuel et la prise de conscience du peuple
 

CHAPITRE 8

                        Israël demande un roi

                                    L'inconduite des fils de Samuel (v. 1-3)

            Le temps a maintenant passé, et Samuel arrive à la fin de sa vie. Alors, il établit ses fils comme juges sur Israël, non pour préparer sa succession, mais vraisemblablement pour se faire seconder dans la partie sud du pays la plus éloignée, à Beër-Shéba. Pourtant, en agissant ainsi, Samuel commet une erreur, puisqu’il prend ces dispositions de son propre chef sans consulter Dieu. Et cette situation va fournir aux anciens un des arguments pour demander un roi.
            Samuel ignorait probablement la triste conduite de ses fils ; il n’était pas un homme à les honorer plus que Dieu, comme Eli. Contrairement à ce dernier, l’Eternel ne fait aucun reproche à Samuel sur ce sujet. La foi et la piété sont personnelles ; aussi ne jetons pas la pierre à des parents fidèles dont les enfants ne suivent pas leurs traces.

                                    Le peuple demande un roi (v. 4-6)

            Représenté par ses anciens, le peuple, ingrat et oublieux, n’a pas assez de foi pour marcher avec Dieu sans conducteur visible.
            Le propos de Dieu était bien qu’un jour, il y ait un roi sur Israël. Mais Dieu avait en vue pour cette fonction son Fils unique et bien-aimé, qu’Il établirait même prince des rois de la terre. Il l’avait annoncé à Abraham (Gen. 17 : 16), à Jacob (Gen. 35 : 11) et à tout le peuple par Moïse : « Tu établiras sur toi le roi que l’Eternel ton Dieu choisira » (Deut. 17 : 14-20).
            Samuel ressent tout de suite l’iniquité d’une telle demande. Le voilà presque rejeté, lui qui avait acquis progressivement et depuis longtemps une autorité morale incontestée (3 : 20), lui qui n’avait jamais voulu prendre le pouvoir comme il en aurait eu l’occasion, lors de la triple disparition d’Eli et de ses fils. Quelle déception et quelle tristesse pour lui ! Les anciens n’ont ni égard ni délicatesse pour cet homme âgé :
                   - « Tu es vieux » : En fait, on estime qu’à cette époque Samuel avait environ 60 ans. Il avait toute son énergie, comme il le montrera plus tard (15 : 33).
                   - « Tes fils ne marchent pas dans tes voies » : Ce n’est qu’un prétexte de la part des anciens, mais ce rappel brutal est une blessure profonde pour le cœur du père (Prov. 19 : 13).

            Mais Samuel pense plus à l’Eternel qu’à son propre rejet. Car le peuple demande un roi « comme toutes les nations ». Or l’Eternel était lui-même roi en Israël, comme il avait été dit : « L’Eternel son Dieu est avec lui et un chant de triomphe royal est au milieu de lui » (Nom. 23 : 21). Il est difficile d’être différent des autres et peut-être même méprisé par fidélité à Dieu.
            L’attitude de Samuel en face des anciens est pleine de noblesse : il les écoute silencieusement, puis, à son habitude, il se tourne vers son Dieu en prière pour lui exposer la situation. C’est un exemple pour nous : lorsque des reproches qui nous semblent injustes, nous sont adressés, recherchons la présence et la pensée de Dieu par la prière.

                                    La réponse de l’Eternel (v. 7-9)

            Samuel n’accuse pas ici le peuple, comme le fera plus tard Elie le Thishbite. Son attitude constante est plutôt de prendre sa défense, comme Moïse autrefois. Mais Samuel ne peut approuver cette demande. Dieu, qui connaît le cœur des hommes et leurs vrais mobiles, lui en donne la raison profonde : « C’est moi qu’ils ont rejeté ». On peut donner au moins trois raisons à ce rejet :
                   - L’ingratitude : Israël oublie sa position à part des autres nations (Nom ; 23 : 9) et sa gloire ; il est la seule nation que Dieu appelle mon peuple : « vous m'appartiendrez en propre d'entre tous les peuples » (Ex. 19 : 5-6).
                   - Le désir d’indépendance : les Israélites se sentent trop à l’étroit sous l’autorité des lois de Dieu et s’imaginent avoir plus de liberté avec un roi comme toutes les nations.
                   - La sécurité humaine à la place de la confiance de la foi : il leur faut un homme visible plutôt qu’un Dieu invisible. Ils veulent une autorité permanente et non une succession de juges temporaires. Ils ont peur de Nakhash, roi des fils d’Ammon (12 : 12) et pensent qu’un roi les protégerait.

            Tel a toujours été le cœur de l’homme depuis Eden : il ne cesse de montrer ingratitude, méconnaissance de ses privilèges, esprit d’indépendance. L’homme veut rompre tout lien avec Dieu, même si ces liens sont des « liens d’amour » (Osée 11 : 4). Il préfère se confier en ses propres ressources qu’en Dieu (Ex. 32 : 1).
            La réponse de l’Eternel apaise Samuel : Dieu l’associe à Lui dans le même opprobre. Préférons, comme le prophète, être rejeté avec Dieu plutôt que populaire sans lui.
            Samuel sait maintenant ce qu’il doit faire. S’il avait de son propre chef refusé la demande du peuple, il aurait été accusé de vouloir garder le pouvoir. S’il avait accepté d’emblée sa voix, il se serait incliné devant ceux qui voulaient rejeter Dieu, comme Pilate (Luc 23 : 23-25).
            Dieu laisse donc le peuple tenter l’expérience. Plus tard, Dieu ôtera ce dictateur : « Je t’ai donné un roi dans ma colère, et je l’ai ôté dans ma fureur » (Osée 13 : 11).

                                    Les droits du roi (v. 10-18)

            Les Israélites auront un roi selon leur cœur, c’est-à-dire charnel. Leur roi les traitera selon les mœurs des souverains de l’époque. Six fois il est dit : « il prendra ». L’homme croit se rendre plus libre en rejetant l’autorité de Dieu, mais en réalité, il devient esclave de sa nature charnelle. Les conséquences de cet asservissement sont multiples et sont suggérées par les divers droits du roi : l’absence de vie familiale (v. 11), les conflits (v. 12), la poursuite du plaisir (v. 13), les exactions (v. 14), la pénurie matérielle (v. 15, 17), la détresse morale (v. 18).
            N’est-ce pas ce que nous constatons souvent, tant sur le plan personnel que sur l’ensemble de la société ?

                                    L’obstination du peuple (v. 19-22)

            Le peuple s’obstine, malgré ces sérieux avertissements, plein d’illusion sur le prestige que lui donnerait un souverain. Dieu enjoint pour la troisième fois à Samuel de les écouter (v. 7, 9, 22). Celui-ci dissout donc l’assemblée sans un mot de reproche. Désirons, pour notre part, rester uniquement sous le joug aisé de notre Seigneur !



CHAPITRE 9

                        Saül, le roi choisi par le peuple

            Le peuple d’Israël vient de demander un roi ; ce chapitre va décrire comment Saül sera choisi et présenté à Samuel. Ainsi, le peuple va passer de Samuel à Saül pour qu’il le juge et le conduise. Va-t-il gagner à cet échange ?

                                    Saül et sa famille (v. 1-2)

            Par sa généalogie, Saül appartient à la tribu de Benjamin, et non pas à Juda, la tribu royale. En effet, « le sceptre ne se retirera point de Juda », avait prophétisé Jacob (Gen. 49 : 10). C’est déjà un indice que Saül ne serait pas le roi que Dieu avait en vue.
            En dépit de son territoire restreint, Benjamin contient des villes de renom, telles que Jérusalem, Béthel, Mitspa, Rama. Cependant, aussi dignes que soient nos ancêtres ou nos parents, nous ne pouvons en aucune manière nous prévaloir devant Dieu de leur qualité morale ; elle ne nous confère aucun mérite, mais une responsabilité supplémentaire.
            Dieu choisit précisément un homme qui ne pouvait lui plaire, mais dont les qualités naturelles répondront aux désirs du peuple charnel (v. 20). Israël ne pourra donc pas se plaindre : Saül est fort, vaillant, beau, grand, un homme d’élite, surpassant tout le peuple (9 : 2 ; 10 : 23). Sans être tout jeune - il a déjà un fils en âge de porter les armes (14 : 1) -, il contraste tout de même avec Samuel que les anciens avaient traité de vieux (8 : 5).
            De plus, Saül possède des caractères moraux attachants : soumis et affectueux à l’égard de ses parents (v. 5), humble (10 : 22), petit à ses propres yeux (9 : 21 ; 15 : 17), magnanime (11 : 13), disposé à écouter les conseils de ses serviteurs (v. 10). Un homme, même incroyant, peut ainsi montrer des qualités naturelles morales qui rappellent qu’il a été créé à l’image de Dieu. C’était en apparence le bon choix. Mais pour Dieu, la belle apparence physique et même morale ne suffit pas : « Ne regarde pas à son apparence ni à la hauteur de sa taille… l’Eternel regarde au cœur » (16 : 7).

                                    La recherche des ânesses perdues (v. 3-10)

            Quand la Bible parle pour la première fois d’un homme, ce qu’elle dit de lui, et en particulier de son activité à ce moment-là, est souvent très significatif de ce que sera plus tard cet homme pour Dieu. Ici, Saül poursuit en vain des ânesses perdues. Plus tard, il poursuivra David d’une haine implacable. En contraste, David, que Dieu choisira pour paître son peuple, sera occupé à garder et protéger le petit bétail quand commencera son histoire (17 : 34-35). Peut-être le peuple d’Israël ressemble-t-il davantage ici à des ânesses sans sagesse, puisqu’il a rejeté l’Eternel (Job 11 : 12), qu’à des brebis dociles, soumises aux soins d’un berger.
            Il est étrange que Saül ignore l’existence de l’homme de Dieu, alors que Samuel était connu dans tout Israël (3 : 20) et que Guibha, domicile de Saül (10 : 26), n’est pas loin de Rama de Tsuph (1 : 1). Sans doute n’y avait-il jamais eu chez Saül un besoin des choses célestes et spirituelles.
            Ce récit peut aussi être lu comme une sorte de parabole : l’homme est en recherche permanente mais vaine. Quand, à bout de ressources, il se tourne vers Dieu, il a bien souvent la pensée de conclure un marché avec Dieu, comme Saül qui veut rémunérer le prophète. Or l’homme doit apprendre qu’il est par nature sans ressource (v. 7), mais que Dieu offre gratuitement sa grâce (Es. 55 : 1-2). Le peu que possède le serviteur est en argent (un quart de sicle). Cela peut évoquer la rédemption ou l’expiation selon la grâce souveraine de Dieu. C’est en effet déjà cette grâce qui nous tire vers Dieu. Mais si on s’approche de Lui, combien cette grâce sera multipliée !
            Appeler un prophète un « voyant » n’est pas la marque d’une haute spiritualité (v. 9). Le sens du mot « prophète » est plus large : il est celui qui paraît et parle comme oracle de Dieu. Dans un temps de déclin, on prend garde aux effets plus qu’à la source.

                                    Le chemin de la ville (v. 10-14)

            Pour aller à la ville du voyant, il faut « monter », comme souvent quand la Bible parle des lieux de communion (Hab. 3 : 19). Puis les deux hommes rencontrent des jeunes filles qui seront de remarquables témoins. Dans l’humilité de leur tâche (puiser de l’eau), elles symbolisent ceux qui s’abreuvent à l’eau de la vie, c’est-à-dire ceux qui sondent les Ecritures. Elles connaissent parfaitement l’homme de Dieu, sa demeure, ses occupations, ses intentions et sont heureuses d’en parler. Elles engagent Saül et son serviteur à aller à lui sans crainte. Quelle belle image du croyant heureux de parler de Celui qui mène au ciel !

                                    La rencontre avec Samuel (v. 15-27)

            Samuel vit dans l’intimité de l’Eternel qui lui révèle ses secrets (Ps. 25 : 14 ; 32 : 8). Contrairement à Saül qui ignore tout, rien ne le surprend. Il a attendu la désignation du roi et il l’accueille maintenant au lieu du sacrifice, là où tout est déjà préparé. Le haut lieu dont il est question aux versets 12, 14 et 19 est préalablement l'autel à l'Eternel bâti par Samuel dans sa ville (7 : 17). La part réservée à Saül rappelle, mais en partie seulement, celle du sacrificateur (Lév. 7 : 31-36 ; Ex. 29 : 27). En effet, seule l’épaule est pour lui, symbole de la force : il est bien investi du pouvoir, mais celui-ci sera dur et arbitraire, car il manque l’autre portion, la poitrine, qui parle de tendresse et d’amour pour le peuple de Dieu.
            Dieu révèle à Samuel que Saül sauvera Israël de la présence oppressante des Philistins. Dans sa miséricorde, Dieu se sert de qui il veut en faveur de ceux qu’il appelle encore « son » peuple, bien qu’il soit sous la discipline. Nous « considérons la bonté et la sévérité de Dieu » (Rom. 11 : 22). Il agit toujours envers les siens en gouvernement (la sévérité) et en grâce (la bonté).
            Saül rencontre Samuel à quatre endroits :
                   - au milieu de la porte, où il reçoit l’invitation,
                   - à la salle de fête, où il a une place d’honneur,
                   - sur le toit de la maison, où il s’entretient en secret avec le prophète,
                   - enfin, à la limite de la ville : là, il apprend qu’il sera prince sur l’héritage de l’Eternel.

            L’injonction du verset 27 nous parle aussi : il est essentiel de nous arrêter et d’écouter la Parole de Dieu avant toute autre action.

 

CHAPITRE 10

                        Saül présenté au peuple

                                    L’onction de Saül (v. 1)

            Samuel oint Saül. Cette huile de l’onction nous parle du Saint Esprit, seule source de puissance pour assurer tout service (voir Zach. 4 : 6). En Israël, l’onction d’huile était réservée au sacrificateur (à sa consécration), au roi (à son avènement) et au lépreux (lors de sa purification). Tout croyant, lépreux par nature, est purifié pour être fait roi et sacrificateur pour Dieu, par la puissance de l’Esprit. Samuel utilise, non pas une corne d’huile comme pour David, mais une fiole, objet plus petit, manufacturé et fragile : il rappelle la vulnérabilité de la nature humaine.
            Samuel embrasse Saül en gage de l’affection et de l’intérêt qu’il porte à celui que Dieu lui-même a revêtu de son autorité. Saül est l’oint de l’Eternel, son représentant devant le peuple. Il en est le prince, donc il en a la charge. Mais ce peuple est l’héritage de Dieu. C’est donc à Dieu qu’il lui faudra rendre compte.
            Retenons cette leçon : un grand honneur et un grand privilège impliquent une plus grande responsabilité.

                                    Samuel annonce les signes donnés à Saül (v. 2-8)

            L’onction de Saül, accomplie par Samuel sans amertume ni réserve, signifiait clairement la désignation du roi.
            Alors le prophète le renvoie en lui indiquant son chemin qui sera jalonné de « poteaux indicateurs ». Les différentes rencontres prédites prouveront à Saül que Samuel, qu’il ne connaissait pas jusqu’alors, était bien un homme de Dieu. Mais elles auront surtout valeur de signes.
                   - Le premier signe (v. 2) : Saül doit commencer sa nouvelle vie de roi en passant au tombeau de Rachel. Là, son ancêtre Benjamin était né d'une mère mourante. De même, tout croyant doit réaliser qu’il est mort par nature mais qu’il est aussi au bénéfice de l’œuvre de celui qui a été mort et qui vit aux siècles des siècles.
            Au tombeau, Saül rencontre deux hommes porteurs de deux bonnes nouvelles : les ânesses sont retrouvées et son père s’inquiète pour lui. Pour nous, cela signifie que nos efforts ne servent à rien parce que Dieu a déjà tout fait pour nous et que nous avons maintenant l’assurance de l’amour de notre Père céleste.

                   - Le second signe (v. 3-4) : la deuxième étape doit mener Saül au chêne de Thabor où il rencontrera trois hommes allant à Béthel. Le chêne est un symbole de force ; « Thabor » signifie « dessein » et Béthel est le lieu où Jacob avait reçu les promesses de Dieu (Gen. 28 : 10-22), puis avait bâti un autel d’adoration (Gen. 35 : 7). Ces images évoquent pour nous la force que nous pouvons puiser dans les promesses que le Dieu fidèle nous a faites. Contrairement à Saül qui n’avait rien eu à offrir à Samuel, les trois hommes pieux rencontrés n’ont pas les mains vides :
                             . l’un porte trois chevreaux (un pour chacun d’eux) : un sacrifice est indispensable pour se présenter à Dieu et chacun doit en faire personnellement l’application ;
                             . le second a des gâteaux de pain, qui parlent du Seigneur, seule nourriture du cœur et de l’âme de chaque croyant ;
                             . l’outre de vin du troisième exprime la joie de l’adorateur qui jouit du Bien-aimé en qui il a la rédemption par son sang ; il n’y a qu’une outre, car cette joie mérite d’être partagée.

                   - Le troisième signe (v. 5-6) : Saül devra ensuite se rendre à Guibha, au « coteau de Dieu », pour y rencontrer à la fois des Philistins et des prophètes. Cela nous rappelle que Dieu agit par son Esprit au milieu de son peuple malgré les ennemis qui s’y sont introduits (Jude 4). Aujourd’hui encore, il est possible de louer Dieu en dépit du triste état de la chrétienté (Ps. 23 : 5). Les trois types d’instruments (à cordes, à percussion et à vent) évoquent des cœurs qui vibrent, battent et chantent pour Dieu dans une harmonie collective.
            Puis l’Esprit descendra et saisira Saül. Il va prophétiser, sera transformé et pourra marcher dans la dépendance directe de Dieu qui sera avec lui. La descente à Guilgal est reportée à plus tard, pour le préparer au combat (13 : 4). La présence de Samuel sera alors de nouveau nécessaire et Saül devra l’attendre, pendant sept jours, une période complète de temps.
            Pendant les deux ans environ qui vont suivre, Saül reprendra vraisemblablement sa vie champêtre ordinaire (v. 7, 26 ; 11 : 5).

                                    Saül saisi par l’Esprit de Dieu (v. 9-12)

            Tout arrive comme Samuel l’avait annoncé. Non seulement Saül prophétise, mais il est changé en un autre homme (v. 6) : « Dieu lui changea son cœur en un autre » (v. 9). Cette transformation accomplie par Dieu pour rendre le roi capable de régner sur le peuple, n’implique pas la communication de la vie divine. Sinon, comment expliquer cette terrible déclaration, à la mort du roi : « Et Saül mourut dans son péché » (1 Chr. 10 : 13) ?
            Les trois signes prévus se réalisent donc exactement, et en un seul jour. Toutefois, seul le troisième est décrit à nouveau dans ce paragraphe. Saül est saisi par l’Esprit de Dieu, ce qui ne manque pas de surprendre l’entourage. En effet le « coteau de Dieu » est à Guibha, la ville de Saül (11 : 5). L’étonnement de ses compatriotes laisse à penser qu’on n’avait encore jamais vu chez Saül un grand intérêt pour les choses de Dieu. Le proverbe composé à cette occasion montre le scepticisme un peu ironique de ces hommes.
            Pourtant le fait est flagrant : Saül prophétise. La question de fond est bien celle-ci : « Qui est leur père ? ». Saül a-t-il le même père spirituel que les autres prophètes ? On peut dire qu’il est « devenu participant de l'Esprit Saint » (Héb. 6 : 4) mais qu’il est ensuite « tombé », sans posséder véritablement la vie éternelle.

                                    La rencontre de Saül avec son oncle (v. 13-16)

            Cette rencontre est significative. Elle aurait été une belle occasion de rendre témoignage. Or Saül ne parle à son oncle ni de Samuel, ni de ses paroles, ni de ses actes, ni de son onction, ni du Saint Esprit qui l’avait saisi. Il ne fait mention que des ânesses retrouvées, ce qui avait bien peu d’importance au regard de tout ce qui lui était arrivé.

                                    Saül désigné roi d’Israël à Mitspa (v. 17-27)

            Afin que le roi soit reconnu de tous, Samuel convoque les fils d’Israël devant l’Eternel à Mitspa où la stèle Eben-Ezer témoignait de la constante fidélité de Dieu. Maintenant, elle sera aussi le témoin de leur rejet de ce Dieu fidèle. En quelques mots, Samuel leur reproche leur ingratitude et leur dureté de cœur.
            De toute façon il est maintenant trop tard. Le roi sera désigné par le sort car « on jette le sort dans le giron, mais toute décision est de par l’Eternel » (Prov. 16 : 33). Saül, se sachant d’avance désigné, se cache et il faut que l’Eternel le fasse trouver. Est-ce une preuve d’humilité ou de lâcheté ? Quoi qu’il en soit, le peuple, heureux d’avoir un roi qui réponde à ses critères extérieurs, l’admire et l’acclame.
            Samuel écrit le droit du royaume, probablement les paroles prononcées précédemment (8 : 10-18) auxquelles il a peut-être ajouté les instructions de la loi de Moïse (Deut. 17 : 14-20).
            Dieu, dans sa grâce, incline la plupart des cœurs à se soumettre à l’ordre qu’il vient d’établir et à lui offrir des dons (comp. 9 : 20). Mais des hommes de rien (des « fils de Bélial ») ont envers lui une attitude méprisante et insultante. Saül ne s’en irrite pas, mais montre une lenteur à la colère qui est pour nous un exemple (Ecc. 7 : 21).

 

CHAPITRE 11

                        Première victoire de Saül (v. 1-11)

                                    Le siège de Jabès par les Ammonites (v. 1-3)

            Ammon et Moab, de la même origine incestueuse (Gen. 19 : 30-38), ont toujours été des ennemis d’Israël. Ils habitaient de l’autre côté du Jourdain. Ils sont une image du monde ouvertement opposé au peuple de Dieu.
            Le pays de Galaad, dont Jabès était la capitale, était toujours objet de convoitise pour les Ammonites. Ils n’avaient jamais accepté d’en avoir été dépossédés par Moïse (Nom. 21 : 24). Ils étaient déjà passés à l’attaque au temps des Juges (Juges 11 : 4). Mais Jephté, homme de foi (Héb. 11 : 32), leur avait infligé une très grande défaite. Les tribus de Ruben, Gad et Manassé, installées par intérêt matériel sur cette rive orientale du Jourdain (Nom. 32), étaient la première cible de ces attaques. Elles sont clairement l’image de chrétiens mondains, peu zélés, qui se tiennent en marge dans l’assemblée. Ils sont les plus exposés à notre ennemi, le diable. En effet, Nakhash signifie « serpent » ; il a bien les caractères du serpent ancien dans son orgueil, dans son ambition d’humilier le peuple de Dieu, dans sa ruse pour tendre des pièges, dans son mensonge, dans ses récidives après que son peuple a été humilié devant Israël (Jug. 11 : 33).
            Jabès, maintenant assiégée, signifie : « sec », « desséché », « sans fruit ». La ville est prête à faire alliance avec l’ennemi et à le servir. Quelle honte ! En réponse, l’adversaire lui fait des propositions inacceptables en voulant crever à tous l’œil droit. Dans le combat, l’œil droit est pratiquement indispensable, car l’œil gauche est à demi-caché par le bouclier. L’application spirituelle est importante. Le diable veut obscurcir la vision de la foi chez ceux qui sont en déclin spirituel. Ne cessons donc pas de veiller et de lutter car une hérésie, une fois réfutée ici, surgira à nouveau ailleurs sous une autre forme (Eph. 4 : 14).

                                    La réponse de Saül (v. 4-10)

            Les messagers de Jabès s’adressent à toutes les tribus et non à Saül en priorité, ce qui montre qu’il n’était pas encore perçu comme le roi. Il va faire preuve de sollicitude à l’égard du peuple qui, par ses pleurs, montre bien peu d’énergie. Une fois informé, Saül passe immédiatement de son activité privée à une action publique. C’est l’occasion qu’il attendait depuis la parole de Samuel : « Tu feras ce qui se présentera à toi ; car Dieu est avec toi » (10 : 7). Il ne pleure pas, mais fait preuve d’énergie sous l’impulsion d’une colère justifiée.
            Mais ne nous fions pas trop à ces indices extérieurs. D’une part, le fait que le Saint Esprit saisisse un homme n’est pas la preuve que celui-ci a la vie de l’Esprit (Balaam en est un solennel exemple). D’autre part, cette colère violente (couper en morceaux la paire de bœufs), faisant d’emblée usage des menaces, est-elle digne d’un roi, revêtu d’autorité et de sagesse ? Il ne compte pas sur une réponse spontanée d’Israël à son appel. Pour appuyer sa proclamation, il s’associe Samuel sans l’avoir, semble-t-il, consulté.
            Les hommes de Jabès se réjouissent des bonnes nouvelles apportées par les messagers. Mais, pour faire croire aux ennemis qu’ils sont sans secours, ils annoncent leur sortie vers eux pour le lendemain dans le but de les surprendre (v. 10).

                                    La victoire d’Israël sur les Ammonites (v. 11)

            L’attaque a lieu avant le matin (La veille du matin se situe entre trois et six heures). Agissant avec habileté et sagesse, Saül divise son armée en trois corps. Et il n’arrête le combat que lorsque tous les ennemis sont détruits ou complètement dispersés.


                        La royauté confirmée (v. 12-15)

                                    La clémence de Saül (v. 12-13)

            Cette victoire a bien sûr un impact immédiat sur la popularité et le prestige de Saül qui apparaît comme le sauveur. Hélas, cette victoire n’est pas significative de l’état du peuple et de la fidélité du roi qu’ils ont demandé. L’avenir le prouvera.
            Pour l’heure, Saül s’est montré compétent et efficace ; aussi le peuple prend-il nettement position en sa faveur. Par esprit de vengeance, il veut tuer ceux qui avaient mis en doute l’autorité de Saül (10 : 27). Curieusement, le peuple s’adresse non à Saül mais à Samuel qui reste, à ses yeux, la plus haute autorité morale.
            Une fois encore, le beau rôle revient à Saül. Il a tout de même l’humilité de reconnaître publiquement que la victoire est due à l’Eternel et il ordonne la clémence.
            Si l’on admet que l’attaque des Ammonites représente un effort du diable pour introduire le mal doctrinal dans l’assemblée, nous voyons que les vainqueurs, qui ont défendu la vérité et refusé l’erreur, sont ensuite pris en défaut par le mal moral, étant animés d’un tout autre esprit que celui de Dieu : vengeance, intransigeance, absence de modération (Luc 9 : 54-55 ; Jac. 3 : 17-18). Lorsque la saine doctrine est défendue dans un esprit charnel, avec un cœur froid et sans réelle piété, la chair produira inéluctablement de mauvais fruits.

                                    La confirmation de la royauté à Guilgal (v. 14-15)

            En face de l’attitude du peuple, Samuel lui propose de se rassembler à Guilgal ; il ne s'agit pas de la rencontre envisagée au chapitre 10 (v. 8), mais de celle qui aura lieu au chapitre 12 (v. 7) en vue d'une nouvelle campagne. Ce lieu symbolise le jugement et la condamnation de la chair (Jos. 5 : 2-9). Oh ! si Saül avait compris la portée spirituelle du lieu du renouvellement de sa royauté ! Le sacrifice de prospérité (ou de communion) aurait pris tout son sens, car ce n’est que lorsque la chair est tenue pour morte que l’on peut vraiment jouir de la communion avec Dieu.
            Pour la première fois pendant le règne de Saül - et hélas aussi pour la dernière - le peuple se réjouit. Mais sa joie vient plus de la victoire qu’il vient de remporter, que de l’Eternel qui l’avait permise.
            Samuel participe à cette joie, mais non sans tremblement, comme le montrent ses paroles au chapitre suivant.

 

CHAPITRE 12

                        Les adieux de Samuel et la prise de conscience du peuple

                                    Introduction

            Samuel va se retirer de la vie publique en tant que juge puisqu’il y aura désormais un roi. Mais il restera :
                   - médiateur entre Dieu et le peuple, en tant que prophète et « messager de l’Eternel des armées » (Mal. 2 : 7) ;
                   - fidèle intercesseur envers le peuple devant Dieu (v. 23).

            Il réfute préventivement toute pensée de suspicion du peuple à son égard. Le but de cette mise au point préliminaire est de donner tout son poids moral à ses dernières paroles. Celles-ci seront en outre appuyées par Dieu lui-même au moyen d’un signe.
            Le passé est ce qu’il est. Il est trop tard pour penser à effacer les infidélités anciennes des pères et les leurs. En revanche, il n’est jamais trop tard pour s’humilier profondément devant l’Eternel. Samuel ne cessera d’intercéder pour eux. Dans l’immédiat, ces paroles pleines de solennité et de grâce réveilleront leurs consciences et toucheront leurs cœurs. Mais pour combien de temps ? Le roi et son peuple seront mis à l’épreuve. Seront-ils fidèles ?

                                    Le plaidoyer de Samuel pour lui même (v. 1-5)

            En ce jour de délivrance et de joie, Samuel désire que le peuple prenne bien conscience qu’il est l’objet de la pure miséricorde de Dieu et qu’il a commis un péché en demandant un roi. Il insiste sur la responsabilité des fils d’Israël : ce n’est pas lui mais eux qui ont réclamé ce changement de régime. Si, plus tard, ils regrettent leur requête, ils n’auront qu’à s’en prendre à eux-mêmes. En effet, quand les choses tournent mal, on cherche généralement d’autres responsables que soi (15 : 15), comme Adam (Gen. 3 : 12-13).
            Puis Samuel établit un contraste pathétique : si le nouveau roi est jeune et vigoureux, lui-même est un vieillard aux cheveux blancs. N’avait-t-il pas été pour eux un fidèle berger, pour les conduire dans les sentiers de justice ? Il avait marché devant eux avec douceur, humilité, piété, cherchant le bien. Maintenant, un roi va marcher devant eux (v. 2) avec orgueil et égoïsme (8 : 11-17). Samuel l’appelle pourtant l’oint de l’Eternel (v. 3, 5).
            A la fin de son ministère, Samuel déclare être quitte envers le peuple. Comme Paul plus tard, il s’était toujours exercé à avoir une conscience sans reproche devant eux (Act. 24 : 16). Il leur fait constater sa droiture et son désintéressement. Il n’avait jamais accepté le moindre présent, comme d’autres hommes de Dieu (Gen. 14 : 22-23 ; Ex. 23 : 8 ; 2 Rois 5 : 16 ; Néh. 5 : 15 ; Es. 33 : 15 ; Act. 20 : 33-34), contrairement à ses fils (8 : 3) et à Saül (8 : 10-17).

                                    Le plaidoyer de Samuel pour Dieu (v. 6-15)

            Si Samuel peut demander au peuple de comparaître devant Dieu, c’est bien parce qu’à l’autorité officielle due à sa fonction (reçue de la part de Dieu), s’ajoutait une autorité morale due à sa personne et reconnue de tous. C’est encore vrai de nos jours : les paroles d’un ouvrier du Seigneur n’ont de valeur que si elles sont en accord avec sa marche.
            Samuel fait alors (v. 8-11) un rappel historique et, pour prendre en quelque sorte la défense de Dieu, il présente quatre arguments au peuple :
                   - La première grande délivrance qu’il ne fallait jamais oublier, celle d’Egypte (v. 8) : « Souvenez-vous de ce jour auquel vous êtes sortis d’Egypte, de la maison de servitude » (Ex. 13 : 3). Ce souvenir n’était-il pas à même de raviver les affections du peuple pour son Dieu comme l’est pour nous, le souvenir de la croix ?
                   - Les infidélités et les ingratitudes de leurs pères (v. 9) : leur oubli de Dieu avait amené inéluctablement leur défaite devant trois ennemis, dont le sens spirituel est pour nous une sérieuse mise en garde : le diable (représenté ici par Sisera qui signifie « ordre de bataille »), la chair qui se mêle des choses de Dieu (ici, les Philistins, l’ennemi intérieur) et enfin, le monde avec sa convoitise (symbolisé par Moab).
                   - Le cri de repentance et la confession (v. 10) : Samuel rappelle textuellement le cri poussé antérieurement par le peuple (Jug. 10 : 10).
                   - La miséricorde inlassable de Dieu (v. 11) : l’Eternel envoya des sauveurs. Quatre sont cités ici, sans ordre chronologique : les trois premiers (Gédéon ou Jerubbaal, Barak ou Bedan et Jephthé) n’étaient pas plus forts que les autres, mais, « de faibles qu’ils étaient, furent rendus forts » (Héb. 11 : 34). Enfin Samuel se cite lui-même, bien que n’étant pas un homme de guerre, mais un intercesseur victorieux.
                   - Ensuite Samuel met en contraste sa droiture incontestable avec la mauvaise foi du peuple (v. 12). Les vraies raisons de son désir d’un roi étaient la crainte de Nakhash et leur absence de foi en Dieu. Les raisons invoquées précédemment (8. 5) n’étaient que des prétextes. Et pour la deuxième fois il leur rappelle leur « non » à l’Eternel (8 : 19 ; 10 : 19). L’Eternel était leur roi. Quel pauvre échange avaient-ils fait ! Préférer se confier à un bras de chair visible plutôt qu’à la main forte d’un Dieu invisible (Jér. 17 : 5-8). Lorsque nous mettons en jeu la sagesse du monde et les moyens humains, en oubliant le secours de Celui dans la main duquel nous sommes, nous aussi nous leur ressemblons !
                   - Par ailleurs, la présence d’un roi n’enlève pas la responsabilité du peuple d’obéir encore à Dieu ; les mises en garde (v. 13-15) de Samuel envisagent deux éventualités, comme Moïse autrefois (Deut. 11 : 27 ; 28) : « si vous craignez l’Eternel » (v. 14), ou « si vous n’écoutez pas la voix de l’Eternel » (v. 15).

            Le mal commis en demandant un roi peut malgré tout tourner en bien si le peuple se soumet à l’Eternel. Il y aura alors paix et bénédiction.

                                    Le verdict divin (v. 16-19)

            Dieu lui-même va confirmer les paroles de Samuel par un signe comme plus tard le Seigneur le fera pour les apôtres (Marc 16 : 20 ; Héb. 2 : 4).
            Alors que le temps de la moisson est une période sans pluie, Samuel annonce l’arrivée d’un orage d’hiver. Le tonnerre figure le jugement de l'Eternel et la pluie pendant la moisson, qui risque d'anéantir les récoltes, représente la malédiction. Ce signe, arrivant le jour même, convainc le peuple qui est saisi d’une crainte salutaire : il confesse sa faute et demande les prières de Samuel. La confession et l’intercession sont le chemin vers le relèvement. Notons en passant qu'on ne voit jamais le peuple demander à Saül de prier pour lui.

                                    Les paroles d’adieu de Samuel (v. 20-25)

            Quelle noblesse dans ces dernières paroles ! Samuel avait eu le souci de tempérer la joie excessive de la victoire (11 : 15) en amenant le peuple à une sincère repentance. Maintenant il l’encourage : « Ne craignez pas ». Le jugement n’est plus à craindre, s’il y a eu repentance. Ce n’est pas Samuel, mais l’Eternel seul qu’il faut craindre (v. 18, 24).
            Samuel accompagne ses encouragements d’exhortations et de promesses fondées sur les ressources divines. Il faut rejeter les vanités mensongères (v. 21) et tourner son cœur vers les vrais biens : le bon plaisir de la volonté de Dieu, la prière, l’enseignement de la Parole (v. 22-23). Ne sommes-nous pas aussi au bénéfice des mêmes bénédictions ? Mais une telle grâce, loin d’engendrer du relâchement, produit une sainte crainte et une marche dans la justice pratique (Ps 130 : 4 ; Tite 2 : 12 ; Héb. 12 : 14 ; 1 Pier. 1 : 15-17).
            Toutefois, au-dessus de toutes nos faiblesses et de notre marche souvent chaotique, quelle assurance de savoir que notre Seigneur (dont Samuel est ici une si belle figure) intercède dans le ciel pour nous, sans jamais se lasser !
            « Il peut sauver entièrement ceux qui s’approchent de Dieu par lui : il est toujours vivant afin d’intercéder pour eux » (Héb. 7 : 25).

 

D'après « Sondez les Ecritures » (vol. 7)