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LE LIVRE DE L’APOCALYPSE  (2b)

 

CHAPITRE  2 (suite)

   Smyrne
   Pergame
   Thyatire
 

Smyrne

            C’est le message le plus court adressé aux sept assemblées, mais il est très touchant.

                        • L’assemblée à Smyrne

            Son nom signifie « myrrhe », un symbole de la souffrance dans la Parole de Dieu. La myrrhe porte en elle-même une odeur d’affliction. Avec l’aloès (figure de la mort), elle était utilisée par les Juifs pour embaumer les corps (Jean 19 : 39-40).
            L’épître à Smyrne présente un tout autre caractère que celle à Ephèse. Elle s’adresse à une assemblée fidèle qui doit traverser de terribles souffrances. Elle rencontre :
                  - des dangers au-dedans de la part des docteurs juifs ou chrétiens cherchant à rétablir les ordonnances judaïques (le légalisme) dans l’assemblée.
                  - des persécutions du dehors, de la part des païens déchaînés par Satan lui-même contre les témoins du Seigneur.
            Prophétiquement, elle annonce une période d’environ 150 ans (de 167 à 313) au cours de laquelle l’église a supporté dix persécutions successives de la part de l’Empire romain, symbolisées par la période de « dix jours » (v. 10). Les dix empereurs romains responsables de ces persécutions sont, dans l’ordre historique : Néron (déjà du temps de Paul), Domitien, Trajan, Marc-Aurèle, Septime-Sévère, Alexandre-Sévère, Décius, Valérien, Aurélien, Dioclétien (le plus acharné après Néron). Les dix jours suggèrent peut-être aussi la durée de la dernière persécution, la plus violente.

                        • Le caractère de Christ

            Le Seigneur se présente d’abord à l’assemblée à Smyrne comme « le premier et le dernier, qui a été mort et qui a repris vie ». Ces attributs de Christ ont déjà été mentionnés dans la vision du Fils de l’homme, comme liés aux gloires de la rédemption (1 : 17-18). Ils sont merveilleusement adaptés à la situation présente des saints : le Seigneur, ayant annulé la mort par sa croix, tient en main la puissance de la vie (2 Tim. 1 : 10). En ayant devant lui la perspective de connaître la mort du corps comme martyr, le croyant fidèle peut ainsi réaliser que la mort, comme la vie, lui appartient (1 Cor. 3 : 22).

                        • Le bien produit par la grâce (v. 9)

            Les afflictions supportées par les chrétiens de Smyrne avaient un triple caractère : tribulation, pauvreté et outrage des prétendus Juifs. Christ entrait en sympathie dans chacune d’elles, car il les avait connues avant eux.
                  1. La tribulation : elle est d’ordre personnel. Les croyants de Smyrne étaient persécutés dans leur corps, comme beaucoup d’autres fidèles témoins (Héb. 11 : 35-38). La rage de l’empire païen contre les chrétiens ne sera dépassée en horreur que par le monde dit « chrétien », notamment dans la période de l’Inquisition.
                  2. La pauvreté : c’est une épreuve d’ordre relatif, car il y a comparaison avec les circonstances des autres. Les croyants étaient dépouillés de leurs biens, comme les Hébreux autrefois (Héb. 10 : 34). En face de la pauvreté extérieure de Smyrne, le Seigneur montre sa vraie richesse intérieure : « riche quant à Dieu » (Luc 12 : 21 ; Jac. 2 : 5). Quel absolu contraste avec Laodicée ! Elle se prétend riche, elle est en réalité « le malheureux et misérable, pauvre, aveugle et nu » (3. 17).
                  3. L’outrage des prétendus Juifs. Cette épreuve d’ordre religieux s’ajoutait aux autres. A Ephèse, de faux apôtres s’étaient déjà manifestés (2 : 2). Ils se sont maintenant groupés au sein même de l’assemblée pour constituer un corps organisé que le Seigneur désigne comme « la synagogue de Satan ». La synagogue était autrefois le lieu de rassemblement des Juifs. Ici, le terme de « Juif » est utilisé symboliquement pour désigner ceux qui se prétendent les héritiers des privilèges du peuple terrestre de Dieu. Ils se regroupent dans un domaine qui n’est autre que le centre d’activité de Satan. Quelle forte expression ! Le même danger réapparaîtra au temps de Philadelphie (3 : 9).

            Les tribulations endurées par Smyrne étaient permises par le Seigneur pour développer chez les saints la vie divine à la gloire de Dieu, et ramener le cœur de l’assemblée à l’état antérieur qu’elle avait abandonné. Chose solennelle, le Seigneur avait laissé Satan exercer sa puissance dans de telles circonstances (v. 10). Il en avait été de même pour Job lors de son épreuve (Job 1 : 12), pour Pierre et les disciples criblés comme le blé aux heures de la croix de Christ (Luc 22 : 31), ou enfin pour Paul qui devait supporter son écharde avec patience (2 Cor. 12 : 7).

                        • Un encouragement spécial

            Aucun blâme n’est adressé à cette assemblée dans la souffrance, appelée justement l’église des catacombes ; aucune invitation non plus à la repentance. Tout au contraire, elle entend un touchant encouragement : « Ne crains en aucune manière ce que tu vas souffrir » (v. 10a).
            Devant Smyrne, Satan se présentait comme le « lion rugissant » (1 Pier. 5 : 8) : il fallait tenir ferme et demeurer fidèle jusqu’à la mort. Dans d’autres temps et d’autres circonstances (en particulier dans nos pays aujourd’hui), Satan se déguise en ange de lumière pour séduire les saints : alors il faut aussi tenir ferme et demeurer fidèle, mais pendant toute la vie. Dans les deux cas, la couronne de vie est promise à celui que le Seigneur maintient dans la fidélité :
                  - « Sois fidèle jusqu’à la mort et je te donnerai la couronne de vie » (v. 10c).
                  - « Bienheureux est l’homme qui endure l'épreuve ; car, lorsque, mis à l’épreuve, il aura été manifesté fidèle, il recevra la couronne de vie, que Dieu a promise à ceux qui l’aiment » (Jac. 1 : 12).
            La couronne de vie exprime la plénitude de la vie éternelle, déployée dans ses perfections au-delà de la vie d’épreuve et de la mort du martyr, dans la présence de Christ, couronné lui-même de nombreux diadèmes (19. 12).

                        • La promesse au vainqueur

            La promesse faite à celui qui vaincra dans l’assemblée à Smyrne est en rapport avec les circonstances que traversait celle-ci. Satan pouvait bien se déchaîner contre les fidèles et lever contre eux l’épée de l’Empereur impie et persécuteur, il ne pouvait rien contre l’âme des saints, même si ceux-ci devaient connaître la mort du corps, la première mort.
            La seconde mort, c’est l’étang de feu (20 : 14), la part de ceux qui seront jugés devant le grand trône blanc, parmi lesquels seront les lâches, les incrédules, les idolâtres et les menteurs (21 : 8). Il ne s’agit pas de la destruction de l’âme qui a une existence éternelle, car pour Dieu tous vivent (Luc 20 : 38), mais d’une séparation définitive d’avec Dieu.
            Tous ceux qui ont la vie de Dieu n’auront pas à souffrir de la seconde mort ; cette promesse est particulièrement rappelée ici pour soutenir la foi des martyrs qui étaient appelés à être fidèles jusqu’à la mort.

 

Pergame

            Voici un tableau saisissant des caractères prophétiques de l’Eglise lorsqu’un monde ennemi devient son protecteur. Se déclarant lui-même chrétien (en 313), l’empereur romain Constantin reconnaît la religion chrétienne. Un peu plus tard (en 392), l’empereur Théodose la déclare seule religion officielle de l’empire romain. Dès lors, l’Eglise (céleste par appel) n’est plus persécutée par le monde, mais se place au contraire sous sa protection; elle devient mondaine.

                        • L’assemblée à Pergame

            Le nom de « Pergame » signifie « une tour », symbole habituel de puissance, depuis la tour de Babel. En outre, dans la Rome antique, la riche ville de Pergame était devenue le haut-lieu des puissances occultes païennes.
            La lettre à l’assemblée décrit un double état moral bien différent de celui de Smyrne.
                  1. Au lieu de se séparer du monde pour rendre témoignage à un Christ rejeté, l’assemblée s’est installée dans le monde, domaine de Satan. De nombreux temples d’idoles ont été transformés en temples chrétiens, tandis que des fêtes païennes étaient adoptées par les chrétiens (la fête des Saturnales est baptisée fête de Noël par exemple). Cette fête était célébrée au solstice d’hiver pour marquer la reprise de la course ascendante du soleil et honorer la naissance du fils de la « Reine des cieux ». Elle a été transformée au temps de Constantin en fête chrétienne rappelant la naissance du Christ, fils de Marie. Cent ans plus tard, apparaît le culte de Marie.
                  2. Sous la protection du pouvoir civil, l’assemblée a pris le caractère d’une puissance abritant des principes moraux mauvais ou mélangés. Le Seigneur est même obligé de constater que Pergame habite là où Satan, le « dieu de ce siècle » (2 Cor. 4 : 4) règne !

                        • Le caractère de Christ

            Devant cet état de choses, le Seigneur se présente comme ayant « l’épée aiguë à deux tranchants » (v. 12), caractère déjà nommé (1 : 16). L’épée à deux tranchants est la « Parole de Dieu » (Héb. 4 : 12). Ce sera le titre du Seigneur de gloire lorsqu’Il sortira du ciel pour exercer le jugement des nations avec l’épée sortant de sa bouche (19 : 13, 15).
            Lorsque l’Eglise cesse d’être entièrement soumise à sa Parole, le Seigneur se sert de celle-ci comme d’une épée pour sonder les cœurs et même exercer son jugement. Importante leçon pour tous les temps !

                        • Le bien produit par la grâce

            Néanmoins, du bien et de la fidélité à Christ subsistaient à Pergame. Pour la première fois, un résidu fidèle est distingué de la masse qui se détourne de Christ.
            Le fidèle « témoin » devient un « martyr » (celui qui est mis à mort pour sa foi en témoignage pour Christ). Le mot français « martyr » dérive du mot grec qui signifie « témoin ».
            Antipas, comme les martyrs de la période précédente (Smyrne), avait porté le caractère de son Maître, le « fidèle témoin » (v. 13 ; 1 : 5 ; 3 : 14). A Pergame certains tenaient donc encore ferme le nom et la foi de Christ, en face de l’hérésie d’Arius (l’arianisme) qui niait la divinité du Fils de Dieu et la valeur de la rédemption par son œuvre. Dieu veillait sur ses droits, en dépit du déclin de l’Eglise !

                        • Les dangers et le blâme

            Le Seigneur reproche deux choses à l’assemblée à Pergame ; au milieu d’elle, des personnes « s’attachaient » à deux fausses doctrines : celle de Balaam (v. 14) et celle des Nicolaïtes (v. 15). Il n’est pas dit que ces doctrines étaient même enseignées ; elles étaient simplement tolérées, sans être jugées et abandonnées. Le mal moral ou doctrinal non jugé souille l’assemblée tout entière.

                  1. La doctrine de Balaam. Balaam signifie « étranger ». Le plus méchant devin a prononcé les plus belles prophéties sur Israël (qui peuvent s’appliquer à l’Eglise). La Parole parle du chemin de Balaam (2 Pier. 2 : 15), de son égarement (Jude 11), et de sa doctrine (Apoc. 2 : 14). Sa mort est rapportée en Nombres 31 : 8 et Josué 13 : 22.
            La doctrine de Balaam était une tentation extérieure. Par amour pour le salaire d’iniquité (2 Pier. 2 : 15), Balaam, retenu par Dieu de maudire Israël, avait poussé le peuple à un double péché :
                 . L’idolâtrie, un péché spirituel : « Enfants, gardez-vous des idoles » (1 Jean 5 : 21).
                 . La fornication, un péché dans le corps : les « convoitises charnelles, qui font la guerre à l’âme » (1 Pier. 2 : 11).
            Des « gens » à Pergame s’attachaient maintenant à cette doctrine et tendaient des pièges aux chrétiens, dans ce double domaine doctrinal et moral.

                  2. La doctrine des Nicolaïtes : ici, c’était un mal intérieur. Les pratiques immorales du monde païen, réprouvées à Ephèse, étaient érigées en doctrine à Pergame par des corrupteurs, au sein même de l’assemblée. Sous prétexte de liberté, un laxisme allant jusqu’à l’immoralité y était toléré et pratiqué.
            La juxtaposition des versets 14 et 15 (« de même ») semble montrer qu’il s’agit d’une seule et même doctrine dont le contenu est éclairé par l’histoire de Balaam.

                        • L’appel à la repentance et l’annonce du jugement

            Si l’assemblée ne se repent pas, la lampe sera sans doute ôtée, mais ici, le jugement est dirigé particulièrement contre les éléments corrompus et corrupteurs dans l’assemblée qui sont encore distingués de l’assemblée tout entière.

                        • La promesse au vainqueur

            Pour la dernière fois, l’exhortation à écouter est placée avant la promesse au vainqueur ; la corruption avait bien fait des progrès dans l’Assemblée, mais n’y régnait pas encore. L’Assemblée est donc encore vue dans son ensemble, malgré son assujettissement au pouvoir temporel.
            La promesse au vainqueur revêt ici deux caractères, tous deux en rapport avec les liens de l’âme avec Christ : la manne cachée et le caillou blanc.

                  1. La manne cachée.
            La manne était le pain envoyé du ciel par Dieu pour nourrir son peuple Israël dans le désert (Ex. 16); elle était la figure d’une nourriture plus excellente : Christ lui-même dans son humanité. La manne cachée était celle qui avait été placée dans la cruche d’or devant l’Eternel (Ex. 16 : 33) en souvenir de ses soins dans le désert ; elle était dans l’arche, dans le lieu très saint, au-delà du voile (Héb. 9 : 4). Pour nous, contempler par la foi Christ sur la terre est la nourriture de notre âme. Du ciel où Il est caché à la vue du monde, Christ donne au vainqueur la nourriture excellente qui fait grandir dans la communion avec Lui.

                  2. Le caillou blanc.
            L’autre promesse au vainqueur est celle du caillou blanc portant un nom connu seulement de celui qui le reçoit.
            En Grèce, le caillou blanc était utilisé :
                – pour signifier l’acquittement lors d’un jugement ;
                – pour honorer un hôte à qui il était remis, revêtu d’une inscription ;
                – pour donner la voix ou le suffrage dans certaines élections. Paul utilise le même mot dans le livre des Actes : « j’apportais mon suffrage » (Act. 26 : 10).
            Le caillou blanc est ici la marque de l’approbation secrète du Maître : un nom donné par Christ, un nom de tendresse et d’intimité de sa part. Ce « nouveau nom », enfin, est un secret entre Christ et le racheté, car le lien de l’âme avec son Sauveur n’est connu que de celui qui en jouit.
            Les rapports personnels de l’âme avec Christ comme nourriture et source de joie dans sa communion se forment sur la terre, mais ont des résultats éternels.

                       • Conclusion

            Par manque de vigilance, les saints avaient laissé agir dans l’assemblée des personnes étrangères prêchant la mondanité, l’idolâtrie (« la doctrine de Balaam ») et l’immoralité (« la doctrine des Nicolaïtes »). Souvent, le discernement manque et plus encore l’énergie morale pour juger le mal. La confession et la repentance sont le seul chemin du relèvement, pour nous comme pour Pergame : « Repens-toi donc » (v. 16).

 

Thyatire

            Dans Thyatire, la quatrième assemblée, le Saint Esprit décrit la suite et la fin de l’histoire de l’Eglise, telle qu’elle avait été formée au temps des apôtres. Son terme - « jusqu’à la fin » (v. 26) - est le retour du Seigneur. C’est à Thyatire et, pour la première fois à une assemblée, que son retour est présenté. L’Eglise primitive avait abandonné son premier amour (Ephèse), puis, après les persécutions (Smyrne), elle s’était alliée au monde (Pergame) ; le mal avait alors envahi l’Eglise tout entière pour prendre le caractère d’adultère, d’infidélité envers Christ. A la suite de Pergame (an 600 environ, date approximative à laquelle le pape Grégoire-le-Grand a dominé sur toute l’église chrétienne), le pouvoir temporel de l’église n’a fait que croître ; jusqu’au retour du Seigneur, l’histoire de Thyatire sera le symbole de l’église où l’homme aura tellement pris la place de Christ que, suscités par le Seigneur dans ce but, d’autres témoins apparaîtront à l’occasion de deux réveils (la Réforme et Philadelphie).
            Dans l’histoire prophétique de l’Église sur la terre, Thyatire se place ainsi au milieu des sept assemblées. Les trois premières la précèdent et se succèdent pour aboutir à elle ; les trois dernières sont issues d’elle, pour coexister parallèlement avec elle jusqu’à la fin. Thyatire s’étend sur la plus longue période : environ 14 siècles jusqu’à aujourd’hui. Et pendant près de 800 ans (la majeure partie du Moyen âge), le seul témoignage que Christ ait réservé à son nom était caché en son sein. Quelle extraordinaire histoire !

                        • Le caractère de Christ  (v. 18)

            Le Seigneur se présente comme le Fils de Dieu et non pas comme le Fils de l’homme (comme en 1 : 13), justement parce que Thyatire n’a pas su reconnaître les droits du Christ, le Fils du Dieu vivant  (Matt. 16 : 16), sur son Assemblée. Jésus Christ en est le seul fondement (1 Cor. 3 : 11), non pas un homme, fût-il l’apôtre Pierre, comme l’enseigne l’église romaine. Il est aussi établi sur la maison de Dieu, comme grand sacrificateur (Héb. 3 : 6 ; 7 : 28).Tous les systèmes qui ont érigé un clergé dans l’Eglise ont substitué l’homme au Fils de Dieu. Christ est aussi revêtu des attributs de la connaissance divine sur toutes choses et de l’exercice du jugement : ses yeux sont comme une flamme de feu et ses pieds sont semblables à de l’airain brillant.

                        • Le bien produit par la grâce (v. 19)

            Au milieu de Thyatire, le Seigneur discernait et approuvait les œuvres, le service, la patience, les fruits de l’amour et de la foi (deux vertus chrétiennes qui avaient déjà disparu dans la première assemblée à Ephèse). Néanmoins, l’ordre moral trouvé chez les Thessaloniciens n’était plus réalisé : œuvres de foi, travail d’amour, patience d’espérance (1 Thes. 1 : 3) ; et l’espérance semblait oubliée à Thyatire.
            Pourtant, on y trouvait un dévouement croissant : « Tes dernières œuvres… dépassent les premières ». Dans les jours sombres d’une corruption générale, la sainteté, l’énergie et le dévouement des fidèles brillaient avec d’autant plus de clarté. Comment douter que l’Esprit annonce déjà ici prophétiquement le témoignage de croyants faibles et persécutés, tels que les Vaudois du Piémont, maintenus fidèles en face d’un ensemble puissant, tyrannique et implacable conduit par des chefs se réclamant même de la succession apostolique. Dans la lignée de cette « si grande nuée de témoins » (Héb. 12 : 1) qui avaient manifesté la puissance de la foi et la patience dans l’épreuve, le Seigneur suscite pour lui des témoins, qui, pourchassés dans ce monde et parfois au prix de leur vie, ont assuré la pérennité de l’Assemblée sur la terre, face aux portes de l’hadès (Matt. 16 : 18). Les persécutions de l’Inquisition, plus violentes et plus raffinées que les pires violences du monde païen, n’ont pu faire céder ceux qui « n’ont pas aimé leur vie, même jusqu’à la mort » (12 : 11). Et Christ conserve dans son livre de souvenir écrit dans le ciel, le nom et les œuvres de ceux qui ont eu tant de prix pour Lui. Certes, ils ne perdront pas leur récompense au jour des rétributions, et ils goûteront à jamais l’approbation et la joie de leur Maître (Matt. 25 : 21).

                        • Blâme et jugement (v. 20-23)

            Le Seigneur interrompt son message aux fidèles de Thyatire, pour juger et condamner le système dans lequel l’Eglise dans son ensemble était tombée. Le levain du mal moral, religieux et ecclésiastique, avait fait lever la pâte tout entière (Matt. 13 : 33). Le caractère moral de ce faux système est figuré par Jésabel, fille du roi des Sidoniens, femme d’Achab, qui l’avait poussé à se vendre pour faire le mal et à tomber dans l’idolâtrie (1 Rois 16 : 30-33 ; 21 : 25-26). Souvent dans la Bible, la « femme » symbolise une institution, un ordre de choses établi. Ici cette femme impure et impie prend, en figure, la place de prophétesse (elle prétend parler de la part de Dieu), avant d’usurper la domination sur les nations et les rois de la terre comme reine (14 : 8 ; 18 : 3, 7) et d’être jugée comme la grande Babylone, la fausse épouse et la grande prostituée assise sur plusieurs eaux (17 : 1-5).
            Les péchés imputés à Balaam au sein de Pergame (v. 14), caractéristiques du mal venant du dehors (commettre la fornication et manger des choses sacrifiées aux idoles), sont maintenant portés au compte de Jésabel qui symbolise un système établi dans l’Eglise et qui, en fait, la représente. Quelle terrible aggravation ! Ce qui s’appelle l’Eglise prétend donc prendre la place de Christ, de l’Esprit Saint et de la Parole de Dieu, pour dispenser un faux enseignement qui égare les croyants (« mes esclaves », ceux de Christ). Les alliances profanes avec le monde et ses idoles sont qualifiées par l’apôtre Paul d’enseignements de démons : le célibat des prêtres et l’abstention de certaines nourritures… (1 Tim. 4 : 1-3). Telle est la tyrannie de ce système ecclésiastique corrompu.
            Le Seigneur laisse du temps pour la repentance (v. 21, 22), car le jugement divin n’est jamais exécuté avant que l’iniquité de l’homme ne soit parvenue à son comble (Gen. 15 : 16). Jésabel ne s’est pas repentie ; aussi le témoignage lui est-il ôté pour être confié à d’autres. Elle est alors l’objet d’un juste jugement qui l’atteindra elle-même et ceux qu’elle a entraînés dans son égarement.
            Ce jugement revêt ici deux formes différentes :
                  - une grande tribulation pour Jésabel et ceux qui ont été entraînés par elle (v. 22), nombreux sans doute, sans l’avoir voulu.
                  - la sentence de mort sur les enfants de Jésabel (v. 23). Les « enfants » de Jésabel sont les hommes issus directement de ce système ; ce sont des idolâtres revêtus de la profession chrétienne. Il ne s’agit pas d’enfants de Dieu, mais plutôt d’enfants du diable (1 Jean 3 : 10).
            Ce double jugement confirme l’omniscience de Christ, qui « sonde le cœur » et « éprouve les reins » (Jér. 17 : 10), et son caractère de « l’Eternel, le Dieu des rétributions » (Jér. 51 : 56), qui rend certainement ce qui est dû, « à chacun selon ce qu’est son œuvre » (Apoc. 22 : 12).

                        • Encore un appel « aux autres qui sont à Thyatire » (v. 24-25)

            Après avoir décrété le jugement de ce système clérical et de la masse infidèle, le Seigneur se tourne vers le résidu fidèle, celui même qui accomplit les « dernières œuvres qui dépassent les premières” (v. 19). Le jugement est décrété alors que l’Assemblée est encore sur la terre ; il sera exécuté effectivement lorsqu’elle sera au ciel (ch. 4 et 5), et que Dieu détruira Babylone (ch. 17 et 18).
            Avec une grande tendresse, le Seigneur encourage « les autres qui sont à Thyatire », par la perspective de son retour pour les prendre auprès de Lui. Pour la première fois, la venue du Seigneur est présentée à ceux qui l’attendent au milieu d’un système apostat. Ils ne partageaient pas la doctrine de Jésabel et ne connaissaient pas « les profondeurs de Satan », terme qui montre la source diabolique de la corruption de ce système. La charge que celui-ci imposait aux fidèles était déjà assez lourde. Aussi, le Seigneur, dont le fardeau est « léger » (Matt. 11 : 30), ne leur impose-t-Il rien d’autre que de « tenir ferme » ce qu’ils avaient, cette mesure de lumière qui leur était confiée au milieu des épaisses ténèbres morales environnantes. Ce que le Seigneur demande ici à ces quelques-uns à Thyatire sera demandé à l’ensemble du témoignage de Philadelphie (3 : 11).
            Ces « autres qui sont à Thyatire » n’avaient pas assez de lumière et d’énergie pour sortir du
système, et, chose mystérieuse, Christ les maintenait là pour la joie de son cœur, jusqu’à la fin.

                        • La promesse au vainqueur

            Pour remporter la victoire, il ne s’agit pas d’accomplir des œuvres, celles que Christ connaît : « tes œuvres » (v. 19) ou celles qu’Il sonde et qu’Il jugera : « vos œuvres » (v. 23), mais simplement de garder les œuvres de Christ : « mes œuvres » (v. 26). Et la récompense promise au vainqueur est double, à la fois d’ordre terrestre et d’ordre céleste :

                  1. Partager avec Christ le gouvernement des nations dans le monde à venir. L’Eglise romaine a usé de pouvoir sur le monde. A terme, la femme (symbole du pouvoir religieux de la chrétienté apostate) domine la Bête romaine, le pouvoir politique (17 :  7, 9). Mais lorsque le Messie régnera, le pouvoir aura changé de mains. Ceux qui avaient souffert régneront avec Christ (2 Tim. 2 : 12). La verge de fer (ou le sceptre) qui brisera les vases de poterie est l’instrument du pouvoir que Dieu donnera à son Fils, lorsqu’Il lui demandera l’héritage (Ps. 2 : 7-9). La communion avec Christ du vainqueur à Thyatire est remarquable : aucune des promesses précédentes n’était aussi complète.

                  2. Partager la joie éternelle de Christ dans la gloire. L’Etoile du matin est en outre promise au vainqueur (v. 28 ; 22 : 16). Christ lui-même est cette étoile (2 Pier. 1 : 19) ; cachée maintenant aux yeux du monde, elle n’est vue que par ceux qui veillent pendant l’absence de Christ, alors que la lampe prophétique est seule à briller. Déjà levée dans nos cœurs, l’Etoile du matin annonce l’aube du jour éternel ; alors luira le « soleil de justice » (Mal. 4 : 2). Précieux encouragement en attendant la délivrance ! Pour le vainqueur, le don de l’étoile du matin par Christ est permanent, assurance d’une joie éternelle avec le Sauveur dans le ciel.

                        • L’exhortation à écouter

            Pour la première fois, cette exhortation suit la promesse, car le Seigneur dès lors ne s’adresse plus qu’à un résidu, et même plus particulièrement au vainqueur. Le rétablissement de l’assemblée dans son ensemble n’est plus en vue. Quelle pensée solennelle ! Les réveils n’ont pas été le relèvement de l’Eglise primitive. Dieu ne rebâtit pas nos ruines, mais Il donne autre chose, selon sa sagesse.

                        • Réforme et protestantisme

            L’histoire de Thyatire subsiste « jusqu’à la fin », le retour du Seigneur. Avec Sardes, une phase parallèle de l’histoire de l’Assemblée va commencer : celle du protestantisme.
            Un travail puissant de l’Esprit de Dieu, la Réforme, s’est opéré pendant plusieurs siècles au sein de l’église de Thyatire qui avait sombré dans la corruption et l’infidélité. Des précurseurs de ce mouvement, tels que Wycliffe en Angleterre, Jean Huss en Bohème, sont apparus dès le 14e siècle. La Bible, livre prohibé par l’église officielle, a été traduite en de nombreuses langues et largement diffusée. La fabrication industrielle du papier et l’invention de l’imprimerie par Gutenberg en 1450 ont été certainement des instruments dans la main de Dieu pour la diffusion universelle de sa Parole.
            La Réforme, au sens strict, se situe au début du 16e siècle, avec, notamment, le travail extraordinaire de Martin Luther en Allemagne, puis de Guillaume Farel et Jean Calvin en Suisse, qui ont remis en lumière des vérités cachées ou oubliées depuis des siècles, en particulier le salut par la foi en Christ sans les œuvres. L’église officielle a réagi par la violence aveugle : l’épée et les bûchers ont mis à mort de fidèles serviteurs du Seigneur, mais n’ont pas pu détruire l’œuvre de Dieu. Ainsi, les violences de l’empire romain contre Smyrne se sont-elles répétées au temps de la Réforme, pour être même dépassées, par ceux mêmes qui se réclamaient du nom de Christ.
            N’ayant pas réussi par la violence et le meurtre, Satan a opéré alors par la séduction. Comme il avait entraîné l’église à Pergame dans le monde au quatrième siècle, Satan a persuadé les descendants des Réformateurs qu’ils devaient rechercher l’appui des puissances politiques. C’était la source d’un inévitable déclin spirituel. Tandis que Thyatire cherche toujours à régner sur le monde, c’est le monde qui règne alors à Sardes. Au reste, certains princes réformés ont aussi régné sur le monde, comme à Thyatire.
            La Réforme, une œuvre de Dieu, a donc été suivie par le protestantisme, marqué par l’œuvre de certains hommes portant seulement le nom de chrétiens et même de protestants, en souvenir de leurs pères qui avaient dénoncé les intolérables abus d’une église infidèle. L’histoire du protestantisme (le système ecclésiastique issu de la Réforme) jusqu’au retour du Seigneur est maintenant décrite par les messages aux trois dernières églises, Sardes, Philadelphie et Laodicée.


D’après « Sondez les Ecritures » (vol. 15)


A suivre