bible-notes.org

Imprimer ou partager la page :

 VOICI  L’HOMME  (4)

 

Tu me renieras trois fois (Matt. 26 : 56, 69-75 ; Marc 14 : 54, 66-72 ; Luc 22 : 54-62 ; Jean 18 : 15-18, 25-27)

 Après l’arrestation du Seigneur Jésus Christ, « tous les disciples l'abandonnèrent et s’enfuirent » (Matt. 26 : 56). Puis Pierre et « l’autre disciple » - il s’agissait de Jean (voir Jean 18 : 15 ; 20 : 2 ; 21 : 20-24) - revinrent, sans doute, sur leurs pas. Déjà lorsqu’il avait tiré l’épée, Pierre s’était exposé à un grave péril pour le Seigneur. Il était sincère quand il avait déclaré : « Seigneur, pourquoi ne puis-je pas te suivre maintenant ? Je laisserai ma vie pour toi ! » (Jean 13 : 37). S’il suit Jésus « de loin » (Marc 14 : 54), il ne l’accompagne pas seulement un bout de chemin, mais pénètre « jusque dans la cour du palais du souverain sacrificateur ». Là, il se mêle à ceux devant qui il avait fui peu auparavant : il « s’assit au milieu d’eux » (Luc 22 : 55). Il voulait « voir la fin » (Matt. 26 : 58), ce qui montre que son cœur était rempli de sollicitude pour son Seigneur.

Il avait toujours manifesté beaucoup de zèle pour Lui. Mais une chose manquait encore à Pierre : il n’avait pas appris à se connaître lui-même et ignorait la complète incapacité de la chair à accomplir la volonté de Dieu. Une terrible chute allait lui apprendre cette leçon ; l’heure de la tentation manifesterait le véritable état de son cœur.

« Le chef du monde vient ; et il n’a rien en moi », avait déclaré le Seigneur Jésus (Jean 14 : 30-31). L’or allait être éprouvé au feu et en ressortirait aussi pur qu’auparavant. Son amour et son obéissance envers le Père furent pleinement manifestés aux yeux de tous. Mais qu’en fut-il des disciples ? Hélas ! chez eux, tout n’était point d’or pur. Le « certain jeune homme » se confiait en son vêtement de fin lin et dut l’abandonner (Marc 14 : 51-52). Pierre se confiait en lui-même et fut couvert de honte.

Et pourtant, avec quelle grâce le Seigneur n’avait-Il pas averti son disciple ! « Simon, Simon, voici, Satan a demandé à vous avoir pour vous cribler comme le blé ; mais moi, j’ai prié pour toi, afin que ta foi ne défaille pas ; et toi, quand tu seras revenu, fortifie tes frères » (Luc 22 : 31-32). Ce nom de Simon dont le Seigneur use en cette occasion rappelle ce que Pierre était par nature. D’un côté le faible Simon ; de l’autre, toute la puissance de Satan qui « a été meurtrier dès le commencement » (Jean 8 : 44) . N’aurait-il pas dû tomber sur sa face et supplier le Seigneur de lui accorder ses compassions et le puissant secours de sa grâce ?

Comment donc n’était-il pas profondément humilié en considérant avec quelle fidélité le Seigneur avait pourvu par avance à sa restauration et lui confiait même un service en faveur de ses frères ? Au lieu de cela, il Lui répond : « Seigneur, avec toi, je suis prêt à aller et en prison et à la mort » (Luc 22 : 33 ; Marc 14 : 29). « Je suis prêt ! ». C’était le langage de la présomption.

N’ayant pas voulu écouter les avertissements du Seigneur, Pierre ne sut pas, le moment venu, veiller et prier. Et parce qu’il négligea la vigilance et la prière, il succomba à la tentation (Marc 14 : 37-38). Lorsqu’elle se présenta, il combattit d’abord l’Ennemi, puis s’associa avec lui et renia à trois reprises son Seigneur, comme celui-ci le lui avait annoncé.

Tandis que le sanhédrin siège dans l’une des salles donnant sur la cour du palais, Pierre se mêle aux serviteurs du souverain sacrificateur et « s’assied au milieu d’eux » (Luc 22 : 55). Cette salle était ouverte du côté de la cour (voir Luc 22 : 61). Le palais, selon la disposition habituelle à cette époque, comprenait une grande cour intérieure, sur laquelle donnaient les salles du bâtiment, précédées d’un péristyle. Pierre se chauffe au « feu de charbon » que les ennemis de son Maître avaient allumé dans la cour « car il faisait froid » (Jean 18 : 18, 25). Comment le disciple aurait-il pu, en un tel lieu, faire preuve de la force dont il s’était vanté ? En fait, il se montre d’emblée plus faible qu’une femme : il prend peur devant le regard scrutateur de la servante - une gardienne des portes (Jean 18 : 17) - qui l’avait laissé entrer sur la recommandation de l’autre disciple, connu d’elle (Luc 22 : 56). Il n’est pas possible d’établir clairement tous les détails de cette scène. Une chose est certaine : Pierre a renié Jésus à trois occasions distinctes, à la suite de l’intervention de plusieurs personnes.

Pierre renie une première fois le Seigneur « devant tous » (Matt. 26 : 70). « Et toi, n’es-tu pas des disciples de cet homme ? Il dit : Je n’en suis pas » (Jean 18 : 17). « Je ne sais ni ne comprends ce que tu dis » (Marc 14 : 68). « Femme, je ne le connais pas » (Luc 22 : 57). 

En proie à une agitation intérieure, il sort « dans le vestibule », où la première, puis une seconde servante et ceux qui étaient avec elle lui adressent la même question (Matt. 26 : 71 ; Marc 14 : 68-69 ; Luc 22 : 58). « De nouveau, il le nia avec serment : Je ne connais pas cet homme ! » (Matt. 26 : 72). Quel langage ! Que la servante appelle le Seigneur Jésus « cet homme » (Jean 18 : 17), nous l’admettons à la rigueur. Mais ici, c’est son disciple qui s’oublie à ce point, peu après Lui avoir juré fidélité jusqu’à la mort.

En Gethsémané, le Seigneur avait subi à trois reprises les assauts de Satan ; le combat devenait toujours plus ardent, mais l’Homme parfait était soutenu par la puissance de Dieu. Le faible disciple, abandonné à lui-même, subit, lui aussi, trois assauts toujours plus violents. Après une brève accalmie, « environ une heure après » (Luc 22 : 59), l’Ennemi lui assène par surprise un coup décisif : « Ta façon de parler te fait reconnaître... d’ailleurs tu es Galiléen » (Matt. 26 : 73 ; Marc 14 : 70). Même l’un des esclaves du souverain sacrificateur, « parent de celui à qui Pierre avait coupé l’oreille, dit : Ne t’ai-je pas vu, moi, dans le jardin avec lui ? » (Jean 18 : 26). Alors le pauvre disciple perd toute contenance. Tandis que, devant Caïphe et ses comparses, « le Témoin fidèle et véritable » (Apoc. 3 : 14) affronte la mort avec une sérénité admirable, Pierre, pour sauver sa vie, se met « à faire des imprécations et à jurer : Je ne connais pas cet homme dont vous parlez » (Matt. 26 : 74 ; Marc 14 : 71).

« Et à l’instant, comme il parlait encore, un coq chanta » (Luc 22 : 60). « Le coq chanta pour la seconde fois », précise l’évangile de Marc (14 : 72). Celui par qui et pour qui tout a été créé (Col. 1 : 16) se servit de cette créature dépourvue d’intelligence, en vue de secourir son disciple tombé si bas. Qui, dans cette nuit-là, pouvait bien prêter attention au chant du coq ? Mais, pour Pierre, ce fut comme un éclair déchirant d’épaisses ténèbres, un réveil plein de terreur. Ah ! que n’a-t-il pris garde au premier chant du coq (Marc 14 : 68) ! Ce n’est qu’au second, « qu’il se souvint de la parole que Jésus lui avait dite : Avant que le coq chante deux fois, tu me renieras trois fois » (Marc 14 : 72). Une restauration serait-elle possible, après une telle chute ? Pierre pourrait-il retrouver un jour la joie de la communion avec son Sauveur ?

Il ne peut qu’être dans une profonde détresse. Mais « le Seigneur, se retournant, regarda Pierre » (Luc 22 : 61). Le regard craintif du disciple est rencontré par le regard plein de compassion de Jésus qui, en dépit des souffrances qui étreignaient son âme, est rempli de sollicitude envers son cher disciple. Loin de se détourner de lui avec horreur, Celui à qui personne n’avait témoigné de compassion (Ps. 69 : 20) exprime, par ce regard, toute la grâce dont son cœur était rempli envers un homme qui venait de « nier trois fois de le connaître » (Luc 22 : 34). Le Seigneur voulait atteindre ainsi le cœur et la conscience de Simon Pierre. Luc seul rapporte ce détail et - fait digne de remarque - dans cet évangile, c’est moins le chant du coq que le regard de Jésus qui amena Pierre à se souvenir de l’avertissement du Seigneur (Luc 22 : 61).

« Etant sorti dehors, il pleura amèrement » (Luc 22 : 62). Ces larmes exprimaient son profond repentir, et elles s’accompagnent de « fruits qui conviennent à la repentance » (Luc 3 : 8). Le « cœur trompeur et incurable » (Jér. 17 : 9) cherche toujours à se contenter de l’une seulement de ces deux choses. On peut manifester des sentiments de regret, tout en persévérant dans un chemin de désobéissance. Mais ce n’est pas là un vrai repentir, il est sans valeur. La « tristesse qui est selon Dieu » avait produit, chez les Corinthiens, « une repentance salutaire dont on n’a pas de regret » (2 Cor. 7 : 10). Il en fut de même pour Pierre : brisé par le regard de son Seigneur bien-aimé, il « sortit dehors », quittant ainsi le lieu qui lui avait été une occasion de chute, tout en versant des larmes amères que produisait le sentiment de sa profonde culpabilité.

Que se passa-t-il par la suite ? Si le chemin qui conduit à l’abîme est rapide, combien ardu et douloureux est celui qui en remonte ! Mais le Seigneur pourvoit à tout en faveur de son malheureux disciple. Il avait prié pour lui avant sa chute. Son regard se pose sur lui alors qu’il vient de la consommer, et, plus tard, Il l’entoure de ses soins miséricordieux en vue de le restaurer entièrement. C’est à lui qu’Il fit annoncer en premier lieu sa résurrection. C’est lui aussi qui fut le premier disciple à qui Il se manifesta (Marc 16 : 7 ; 1 Cor. 15 : 5). « Le Seigneur est réellement ressuscité, et il est apparu à Simon » (Luc 24 : 34). Jésus « apparut premièrement à Marie de Magdala » (Marc 16 : 9), mais en 1 Cor. 15, il n’est question que des témoins masculins de sa résurrection.

De même que le Seigneur, s’étant levé du souper, avait pris de l’eau pour laver les pieds des disciples, sa parole divine fut l’eau purificatrice dont Il se servit, lors de sa première rencontre avec Pierre, pour laver ses pieds souillés. « Si je ne te lave pas, tu n’as pas de part avec moi », lui avait-Il dit ce soir-là (Jean 13 : 7-8). Ce que Pierre ne comprit pas alors, il le comprit « dans la suite », c’est-à-dire lors de cette première rencontre avec Christ ressuscité. Cependant la Parole ne rapporte nulle part l’entretien qui eut lieu entre le Seigneur et son disciple : le Saint Esprit a étendu pour toujours le voile du secret sur cette heure où s’est certainement opéré un travail profond. Le cœur de Pierre était encore bien lourd lorsqu’il courait au tombeau, avant cette rencontre avec Jésus ! (Jean 20 : 4). Mais après qu’elle a eu lieu, lorsqu’il apprend que c’était le Seigneur qui se tenait sur le rivage de la mer de Tibérias, il « mit son vêtement de dessus... et se jeta à la mer », tant il était impatient de jouir de sa présence (Jean 21 : 7-9). Le Seigneur avait préparé là un feu pour son cher disciple, auprès duquel celui-ci pouvait se réchauffer. L’entretien qu’Il eut ensuite avec Pierre révéla clairement à ce dernier la racine du mal qui avait amené sa chute : sa confiance en la chair. Cette racine ayant été entièrement jugée, Pierre se voit confier un nouveau service. Grâce à cette œuvre de restauration, put s’accomplir la parole que Jésus lui avait dite : « Et toi, quand une fois tu seras revenu, fortifie tes frères » (Luc 22 : 32).

Anticipant quelque peu la suite des événements, nous aimerions jeter un regard sur la scène décrite en Actes 4. Nous y retrouvons le même sanhédrin (v. 15), les mêmes hommes (v. 6), les mêmes disciples (v. 13) que ceux que nous venons de rencontrer, à cela près que, cette fois-ci, les disciples sont au banc des accusés, à la place que leur Seigneur avait occupée Lui-même. Mais quel changement chez eux ! Le cœur de Pierre n’est plus rempli de confiance en lui-même, mais « du Saint Esprit » (v. 8). Il n’éprouve plus aucune crainte envers les hommes, mais agit et parle dans la puissance du Seigneur. Aussi, bien loin de Le renier, il confesse hautement devant tout le peuple « le nom de Jésus Christ le Nazaréen », le seul nom « qui soit donné parmi les hommes, par lequel il nous faut être sauvés » (v. 9-12).

Les principaux sacrificateurs « les reconnaissaient pour avoir été avec Jésus » et « s’étonnaient » de leur hardiesse lorsqu’ils s’aperçurent « qu’ils étaient des hommes sans instruction et du commun » (v. 13). Combien plus grand encore aurait été leur étonnement s’ils avaient su à quel point ces hommes étaient faibles et misérables en eux-mêmes, ainsi que Pierre l’avait prouvé en reniant son Maître. Mais si leurs yeux avaient été ouverts, ils auraient été émerveillés - comme nous - de l’œuvre que la grâce divine avait opérée pour la restauration de ce faible disciple, au point qu’il pouvait déclarer au peuple : « Mais vous, vous avez renié le Saint et le Juste » (Act. 3 : 14).

 

D’après  von Kietzell Fritz  – « Messager Evangélique » (1969 p. 91-98)

 

A suivre