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Le sermon sur la montagne (11)

 
 
La prière (Matt. 6 : 5-15)

            Dans les versets 1 à 18, le Seigneur Jésus parle de la justice pratique des siens, c'est-à-dire de l'attitude qui convient à ses disciples dans leur vie de foi quotidienne. Il fait tout d'abord mention de l'aumône (v. 2-4), exemple de l'attitude à avoir vis-à-vis de notre prochain dans le besoin, ensuite de la prière (v. 5-15), qui manifeste nos relations avec Dieu, et finalement du jeûne, qui nous concerne individuellement. Dans chacun de ces domaines, un danger nous guette, un danger qui ne provient pas de l'extérieur, mais de nous-mêmes, de notre propre moi. C'est l'hypocrisie, et le Seigneur nous met en garde contre elle.

                        Des prières hypocrites

            « Quand vous priez, ne soyez pas comme les hypocrites, car ils aiment prier debout dans les synagogues et aux coins des rues, pour être vus des hommes. En vérité, je vous le dis: ils ont déjà leur récompense ! » (v. 5).

            La prière a été appelée « la respiration de l'âme ». Par elle, nous rendons grâces à Dieu notre Père pour ses bienfaits et ses bénédictions (Col. 1 : 12). Nous pouvons lui exposer nos requêtes et rejeter sur lui tous nos soucis (Phil. 4 : 6 ; 1 Pier. 5 : 7) ; nous pouvons prier pour nous-mêmes, pour tous les saints, et pour tous les hommes (Eph. 6 : 18 ; 1 Tim. 2 : 1). Nous exprimons dans nos prières notre communion avec Dieu, mais aussi notre complète dépendance. C'est pourquoi la prière est aussi importante pour notre vie de foi que la respiration pour le corps.
            Pourtant, la prière, cette « conversation » de l'âme avec Dieu, peut devenir un simple exercice religieux, voire même l'occasion de se mettre en valeur. Ce danger concerne avant tout la prière en public, déjà dans la famille, mais surtout dans l'assemblée. Un enfant disait à son père : « Lorsque nous avons des visites, tu pries tout autrement que d'habitude ! ». Bien des prières exprimées dans les réunions sur un ton cérémonieux et avec un flot surabondant de paroles font naître la question : celui qui prie ne s'adresse-t-il pas à l'assistance plutôt qu'à Dieu ?

            Le Seigneur attire l'attention de ses disciples sur de tels dangers, en leur parlant des hypocrites qui aimaient prier en public pour être vus des hommes et admirés pour leur dévotion. En ce temps-là, la coutume voulait que les Juifs récitent des prières bien déterminées à certaines heures de la journée (comp. Act. 3 : 1). Cela se passait habituellement au temple ou à la synagogue. En cas d'empêchement, on pouvait aussi prier à l'endroit où l'on se trouvait. Le Seigneur Jésus fait sans doute allusion à ces coutumes. Ce qu'il dit ne signifie pas qu'il taxe d'hypocrisie toute prière publique. Notre Seigneur a lui-même prié en public (Matt. 14 : 19 ; 15 : 36). Les premiers chrétiens l'ont fait aussi (Act. 12 : 5 ; 20 : 36 ; 27 : 35 ; 1 Tim. 2 : 8). Dans ces paroles du Seigneur Jésus, il ne s'agit donc pas du cadre extérieur, mais de notre attitude intérieure et du motif de la prière. Dieu connaît tous les recoins de nos cœurs. « Car la pensée n'est pas encore sur ma langue, que voilà, ô Eternel !  tu la connais tout entière » (Ps. 139 : 4). Puisque nous savons que nous ne pouvons pas Le tromper par des apparences, ne cherchons pas à le faire avec nos auditeurs. A une prière simple et sobre, ils pourront toujours dire un amen sincère et fervent.

            « Mais toi, quand tu pries, entre dans ta chambre, et, après avoir fermé ta porte, prie ton Père qui demeure dans le secret ; et ton Père, qui voit dans le secret, te récompensera » (v. 6).

            Nous le répétons : par ces paroles, le Seigneur ne condamne nullement la prière en public pour ne vouloir que la prière personnelle. Au danger de l'hypocrisie, qui peut naître pendant la prière en public, il oppose la prière sans témoins. Seuls avec notre Père, nous pouvons prier sans détours, suivre les élans de notre propre cœur, sachant qu'il connaît nos pensées, nos misères et nos soucis cachés. Cependant nous devons avoir la même sincérité lorsque nous prions en public. Bien sûr, nous ne pouvons pas présenter alors tout ce que nous exposons dans le secret de notre chambre. Parfois, cette différence entre la prière personnelle et la prière présentée en commun n'est pas bien comprise, ou est oubliée. Mais la sincérité et la simplicité devraient caractériser et l'une et l'autre.

 
                         Des prières redondantes

            « Quand vous priez, ne répétez pas de vaines paroles, comme ceux des nations, parce qu’ils s'imaginent qu'ils seront exaucés en parlant beaucoup. Ne leur ressemblez donc pas, car votre Père sait de quoi vous avez besoin avant que vous le lui demandiez » (v. 7- 8).
            Si le Seigneur dénonce publiquement l'hypocrisie des Juifs, il accuse les nations païennes d'user de vaines répétitions et de beaucoup de paroles dans leurs prières (comp. 1 Rois 18 : 26-29). En outre, il met aussi en garde ses disciples contre les prières superficielles. Il savait à l'avance ce qu'il se produirait dans la chrétienté. La répétition constante de prières toutes faites n'est pas seulement le propre des religions païennes, elle se pratique également dans des églises chrétiennes.
            Cela ne signifie pas pour autant que, dans nos prières, nous ne puissions pas répéter souvent certaines demandes qui nous tiennent particulièrement à cœur. Nous devons distinguer entre les vaines répétitions de formules toutes faites et la prière intense et persévérante d'un croyant qui, dans sa détresse, présente plusieurs fois la même requête. Le Seigneur Jésus n'a-t-il pas donné lui-même à ses disciples l'exemple de la veuve et du juge inique pour leur montrer qu'ils devaient toujours prier et ne pas se lasser ? A cette occasion, il dit expressément : « Et Dieu ne ferait-il pas justice à ses élus, qui crient à lui jour et nuit, lui qui use de patience avant d'intervenir pour eux ? » (Luc 18 : 1-8 ; cf. Act. 12 : 5 ; Rom. 12 : 12 ; Eph. 6 : 18).

            « Car votre Père sait de quoi vous avez besoin, avant que vous le lui demandiez ».
D'une part, notre Père sait de quoi nous avons besoin ; d'autre part il veut nous amener à la conscience de notre propre faiblesse, entretenir en nous le sentiment de notre dépendance de Lui, et nous maintenir dans la jouissance de sa communion. La prière personnelle, en toute confiance, est le meilleur moyen de le réaliser.

 
                        Le « notre Père »

            « Vous donc, priez ainsi : Notre Père qui es dans les cieux, que ton nom soit sanctifié ; que ton règne vienne ; que ta volonté soit faite, comme dans le ciel, aussi sur la terre. Donne-nous aujourd'hui le pain qu'il nous faut ; remets-nous nos dettes comme nous aussi nous remettons à nos débiteurs ; et ne nous expose pas à la tentation, mais délivre-nous du mal » (v. 9-13).
            Après les avoir mis en garde contre l'hypocrisie et la superficialité, le Seigneur montre à ses disciples comment prier. A leur demande : « Seigneur, enseigne-nous à prier », Il donne, en Luc 11 : 2-4, un modèle de prière très proche de celui qu'Il donne ici, mais plus bref et en d'autres termes. Bien que cette prière sorte de la bouche du Fils de Dieu, et soit par conséquent parfaite, ces différences devraient nous garder d'en faire une prière figée. Néanmoins, cette prière communément appelée le « notre Père », est devenue dans la chrétienté la prière la plus souvent récitée : dans l'église catholique, c'est la forme de Luc 11 qui est en vigueur, tandis que dans l'église protestante, on se sert de Matthieu 6. Comme le prouvent de nombreux manuscrits grecs du Nouveau Testament, des copistes ont très tôt complété la prière de Matthieu 6 par une doxologie, afin de lui donner une digne conclusion : « car à toi est le règne, et la puissance, et la gloire, à jamais. Amen ».
            Il ne faut pas non plus oublier à quelle époque le Seigneur Jésus a enseigné cette prière à ses disciples. Le Messie était présent, mais la loi du Sinaï était encore en vigueur ; le résidu d'Israël attendait le royaume de Dieu, mais Christ n'avait pas encore accompli son œuvre expiatoire à la croix, et le Saint Esprit n'était pas encore venu. Cette prière correspondait à la situation d'alors. Il est vrai que le Seigneur a aussi institué la cène et le baptême durant son séjour sur la terre, et que ceux-ci étaient destinés à subsister. Toutefois il y a une différence essentielle entre ces deux institutions et le « notre Père » : les premières portent nos pensées sur son œuvre rédemptrice, tandis que celle-ci n'est nullement mentionnée dans le « notre Père ».

            Comme chrétiens, nous pouvons aujourd'hui nous adresser à Dieu, notre Père en Christ, dans la puissance et sous la direction du Saint Esprit (Eph. 6 : 18 ; Jude 20). Par Jésus, nous avons une pleine liberté pour exposer nos requêtes à Dieu par des prières et des supplications, avec des actions de grâces (Phil. 4 : 6). Jadis, les disciples ne connaissaient pas un tel privilège.
            Pour nous aujourd'hui, l'enseignement le plus important du « notre Père » réside dans sa structure. Les trois premières demandes ont en vue les intérêts de Dieu, notre Père qui est dans les cieux (comp. 5 : 16, 45, 48) : son nom, son royaume et sa volonté sont au premier plan. C'est seulement ensuite que viennent les quatre demandes relatives à nos besoins: notre nourriture, nos dettes, nos tentations, notre délivrance. Comme nos prières sont souvent différentes ! Combien peu nous pensons à l'honneur et à la gloire de notre Seigneur et de notre Dieu ! Par contre, nous sommes beaucoup occupés de nos propres misères, grandes ou petites. Soyons davantage attentifs à Lui apporter la louange et l'adoration, que ce soit dans nos prières personnelles ou collectives.

 
                         L'esprit de pardon

            « Car si vous pardonnez aux hommes leurs fautes, votre Père céleste vous pardonnera aussi à vous ; mais si vous ne pardonnez pas aux hommes leurs fautes, votre Père ne pardonnera pas non plus vos fautes » (v. 14-15).
            Dans ces versets, le Seigneur revient à la cinquième demande du « notre Père ». Dans ses voies gouvernementales, le Père qui est dans les cieux ne peut pas supporter chez ses enfants un cœur qui n'est pas prêt à pardonner. Comme il nous est souvent difficile de pardonner de tout cœur les fautes d'autrui - que nous exagérons peut-être, ou même, que nous imaginons ! Et cela peut nous rendre très malheureux. Mais ce qui est encore beaucoup plus grave, c'est que le Père qui est au ciel ne pardonne pas à ses enfants s'ils ne sont pas disposés à pardonner les fautes à leurs semblables.
            Quel pardon merveilleux et parfait nous avons reçu de la part de Dieu, alors que nous étions pécheurs ! Lui avons-nous, lors de notre conversion, confessé toutes nos fautes ? C'est impossible. Pourtant Dieu, en Christ, nous a pardonné tous nos péchés, à toujours.

            L'apôtre Paul présentera plus tard aux Ephésiens ce pardon parfait et éternel de Dieu comme le modèle des sentiments devant caractériser leurs relations mutuelles : « Mais, les uns à l’égard des  autres, soyez bons, compatissants, vous pardonnant les uns aux autres, comme Dieu aussi, en Christ, vous a pardonné » (Eph. 4 : 32). A ce moment-là, le Seigneur n'avait pas encore accompli son œuvre, et ne pouvait pas encore parler du pardon divin et éternel. Mais Il exhorte ses disciples - et nous aussi - à être toujours disposés à pardonner, de manière que notre Père céleste puisse aussi nous pardonner et que nous demeurions en communion pratique avec Lui.

                       

         A. Remmers – article paru dans le « Messager Evangélique » (1995 p. 26-32)

 
 
A suivre